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L'IA vole notre âme d'artiste : le prix invisible de la création instantanée

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Rédigé par
Thierry Akaya
Date
21/4/2025
Temps de lecture
23:42 min
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Introduction

L'émergence de l'intelligence artificielle générative a bouleversé le monde de l'art digital et du dessin numérique. En quelques clics, n'importe qui peut désormais créer des images impressionnantes sans maîtriser les techniques fondamentales du dessin.

Cette révolution technologique soulève pourtant des questions essentielles sur l'authenticité artistique, le développement de nos compétences créatives et l'éthique de ces outils.

En tant qu'artiste digital, j'observe avec inquiétude comment l'IA transforme notre rapport à la création, souvent au détriment des artistes dont le travail a été utilisé sans consentement pour entraîner ces algorithmes. Mais cette facilité apparente ne cache-t-elle pas un piège ?

N'est-elle pas en train de nous priver des plaisirs de l'apprentissage et de l'expression personnelle, tout en soulevant de graves problèmes éthiques et juridiques ?

Allons explorer pourquoi la dépendance à l'intelligence artificielle dans le dessin numérique pourrait paradoxalement nous éloigner de la véritable créativité et nous faire sombrer dans une forme de paresse artistique, tout en contribuant à des pratiques contestables.

L'IA et l'illusion de maîtrise dans l'art digital

Quand tu utilises un outil d'IA générative pour créer une image, tu obtiens instantanément un résultat visuellement séduisant. C'est magique, n'est-ce pas ?

Une simple description textuelle, et voilà qu'apparaît une œuvre qui aurait pu te demander des heures, voire des années de pratique.

Mais cette facilité est trompeuse. L'instantanéité du résultat masque un fait crucial : tu n'as pas développé les compétences nécessaires pour créer cette image par toi-même. C'est comme si quelqu'un d'autre dessinait à ta place, tandis que tu te contentes de donner des instructions.

En tant qu'artistes, nous savons que la maîtrise technique ne s'acquiert qu'à travers :

  • Des heures d'entraînement et de répétition
  • L'étude approfondie des fondamentaux (anatomie, perspective, théorie des couleurs)
  • L'expérimentation et les erreurs formatrices

L'intelligence artificielle court-circuite ce processus d'apprentissage. Elle te donne l'illusion d'être créatif, alors qu'en réalité, tu deviens un simple opérateur qui tape des prompts. La véritable maîtrise artistique implique de comprendre pourquoi et comment certaines décisions visuelles fonctionnent, pas seulement d'obtenir un résultat séduisant.

Il est important de rappeler que les capacités humaines en matière de création artistique doivent être préservées et continuellement développées, sans les rejeter au profit d'outils automatisés. Ces compétences t'offrent un pouvoir et des possibilités infiniment plus vastes en tant qu'artiste, contrairement aux approches paresseuses qui utilisent l'IA à outrance. Ce n'est pas parce qu'un outil technologique existe qu'il doit remplacer ta créativité naturelle.

Imagine un pianiste qui utiliserait un logiciel pour jouer parfaitement des morceaux complexes sans jamais avoir touché un piano. Pourrait-on vraiment parler de talent musical ?

C'est exactement ce qui se passe quand on confie entièrement notre art digital à l'IA.

L'atrophie des compétences créatives face à l'IA générative

L'utilisation intensive des outils d'IA pour le dessin numérique entraîne une atrophie progressive de nos capacités créatives. Comme un muscle qui s'affaiblit faute d'exercice, notre cerveau créatif perd en vigueur lorsqu'il est sous-sollicité.

Quand tu dessines manuellement, ton cerveau effectue un travail complexe :

  • Il résout des problèmes visuels en temps réel
  • Il fait des choix esthétiques conscients et inconscients
  • Il établit des connexions uniques entre tes influences, tes émotions et tes techniques
  • Il développe une compréhension intuitive de la lumière, des volumes, de la perspective et des proportions

Le simple fait d'écrire une commande textuelle ne fait pas de toi un(e) artiste. Cette approche te prive de la compréhension fondamentale des éléments visuels.

Comment peux-tu prétendre maîtriser l'art sans comprendre comment fonctionne la lumière, comment se construisent les volumes, comment s'appliquent les règles de perspective ou comment respecter des proportions harmonieuses ?

Exemple images IA 1
Regarde ces exemples d'images d'IA complètement désastreuse !

En déléguant ce travail à l'intelligence artificielle, tu prives ton cerveau de ces précieuses opportunités d'entraînement. La créativité n'est pas un don mystique, mais une compétence qui se cultive à travers la pratique régulière et l'exploration active.

Pense à ces artistes que tu admires. Leur style distinctif ne s'est pas formé du jour au lendemain, mais à travers des années d'expérimentation, d'échecs et de découvertes. En utilisant systématiquement l'IA pour créer ton art digital, tu te prives de ce parcours formateur qui forge une identité artistique authentique.

Les outils numériques traditionnels (Clip studio paint, Blender, Procreate...) sont des extensions de ta créativité. L'IA générative, en revanche, tend à se substituer à celle-ci.

La différence est fondamentale : dans un cas, tu restes le créateur principal avec un contrôle total sur chaque aspect de ton œuvre, y compris la gestion des calques et les moindres détails ; dans l'autre, tu deviens un simple curateur d'outputs générés automatiquement, souvent de qualité médiocre avec des imperfections horribles au niveau des mains, des bouches, des yeux ou des cheveux, sans possibilité de corriger quoi que ce soit avec précision.

L'IA dans l'art : une créativité de surface sans profondeur émotionnelle

L'intelligence artificielle produit des images techniquement impressionnantes, mais il leur manque souvent cette profondeur émotionnelle qui caractérise l'art humain authentique. Cette dimension personnelle est difficile à saisir, mais elle fait toute la différence.

Lorsque tu crées manuellement une œuvre d'art digital, tu y insuffles :

  • Tes expériences personnelles
  • Tes émotions du moment
  • Tes influences culturelles uniques
  • Les "accidents heureux" qui surviennent pendant le processus créatif

Ces éléments donnent à ton travail une authenticité que l'IA générative peine à reproduire. Malgré toute sa sophistication, l'IA ne peut qu'imiter l'apparence extérieure de l'émotion, pas la vivre ou la transmettre véritablement.

J'ai souvent observé que les œuvres générées par l'IA dans le domaine du dessin numérique possèdent une certaine homogénéité esthétique. Même lorsqu'elles sont techniquement parfaites, elles manquent souvent de cette "signature" qui fait qu'une œuvre nous touche profondément.

C'est comme la différence entre une mélodie composée par un musicien passionné et un algorithme qui imite parfaitement le style de ce musicien. Techniquement similaires, mais émotionnellement différentes.

Comment l'IA générative nous décourage d'apprendre les bases du dessin numérique

La facilité d'utilisation des outils d'IA générative crée un dangereux raccourci psychologique. Pourquoi passer des années à maîtriser les fondamentaux du dessin numérique quand tu peux obtenir des résultats impressionnants en quelques minutes ?

Ce raisonnement séduisant décourage de nombreux artistes débutants d'investir dans l'apprentissage des techniques fondamentales :

  • La compréhension de l'anatomie
  • La maîtrise de la perspective
  • L'étude de la composition
  • La théorie des couleurs
  • La gestion de la lumière et des ombres

Ces compétences constituent pourtant la base sur laquelle repose toute expression artistique solide. Sans elles, un artiste reste dépendant des outils automatisés et limité dans sa capacité à exprimer une vision personnelle.

L'intelligence artificielle nous propose un raccourci tentant, mais trompeur. C'est comme vouloir devenir chef cuisinier en utilisant uniquement des plats préparés qu'on réchaufferait. Le résultat peut satisfaire la faim immédiate, mais ne développera jamais ta compréhension des saveurs, des techniques et des possibilités culinaires.

Pour les artistes en formation, l'IA peut devenir une béquille qui empêche le développement de l'autonomie créative. La vraie maîtrise artistique demande du temps, de la persévérance et une pratique régulière que la génération instantanée d'images par l'IA semble rendre obsolète.

Je te démontre les horreurs que l'IA peut faire, ça n'a rien d'extraordinaire quand tu remarques bien. 😏

Les erreurs flagrantes et horribles des images d'IA générative !
Les erreurs flagrantes et horribles des images d'IA générative !

La dépendance à l'IA dans l'art digital : créer sans comprendre

L'utilisation intensive des outils d'IA générative pour le dessin numérique crée une forme de dépendance particulièrement problématique. Au lieu de développer ta compréhension des principes artistiques, tu deviens dépendant d'un système dont tu ne maîtrises que l'interface, pas les mécanismes profonds.

Cette dépendance se manifeste de plusieurs façons :

  • Tu te retrouves incapable de créer sans l'aide de l'outil d'IA
  • Tu passes plus de temps à perfectionner tes prompts qu'à développer tes compétences artistiques
  • Tu te focalises sur le résultat final plutôt que sur le processus créatif
  • Tu perds progressivement confiance en tes capacités de création autonome
  • Tu contribues inconsciemment à un système qui exploite le travail d'autres artistes

Un aspect particulièrement troublant de cette dépendance est le manque de compassion envers les artistes professionnels qui voient leur gagne-pain menacé. Beaucoup d'artistes éprouvent une peur légitime de perdre leur travail et de se faire remplacer par ces technologies. Ils craignent de ne plus pouvoir vivre dignement de leur passion. Utiliser l'IA générative sans conscience de cette réalité, c'est fermer les yeux sur l'anxiété d'une communauté entière de créateurs.

Regarde comment les affiches de film ⬇️ qui ont été en si peu de temps et sans aucun effort humain.

Poster film IA
De gauche à droite : James Bond, Star wars, Godzilla et John Wick (vol des affiches des films connus)

Ça peut paraître "génial", mais cela n'a rien de chouette et d'incohérence !

C'est comme si un écrivain devenait incapable de rédiger sans un correcteur automatique qui reformulerait toutes ses phrases. Le résultat peut sembler impeccable, mais l'écrivain perd sa voix propre et sa maîtrise du langage. 😬

J'ai envie de dire : "Où est passé ton humanité ?"

Dans l'art digital, comprendre pourquoi certains choix visuels fonctionnent est aussi important que d'obtenir un résultat esthétique. L'IA te donne le résultat sans la compréhension, ce qui limite fondamentalement ton évolution artistique à long terme.

Plus inquiétant encore : cette dépendance s'installe souvent insidieusement. Tu commences par utiliser l'intelligence artificielle comme simple outil d'inspiration ou d'assistance, puis tu te retrouves progressivement incapable de créer sans elle. Ce qui n'était qu'une expérience par curiosité devient une béquille dont il est difficile de se défaire.

Tiens par exemple d'invention de poster autour de chiens. Regarde les nombreux inconhérences !

3 posters d'image généré par l'IA

L'uniformisation de l'esthétique artistique par l'IA générative

Un phénomène préoccupant émerge dans le monde de l'art digital : l'uniformisation esthétique causée par l'utilisation massive d'outils d'IA générative. Ces systèmes, entraînés sur des bases de données similaires, produisent souvent des œuvres qui partagent certaines caractéristiques reconnaissables.

Cette uniformisation se manifeste par :

  • Des styles visuels récurrents et identifiables
  • Des solutions esthétiques standardisées face à des prompts similaires
  • Une certaine saveur numérique reconnaissable dans le rendu final
  • L'émergence d'une esthétique IA distincte mais homogène

Un problème fondamental rarement abordé est celui du vol massif d'images utilisées pour entraîner ces systèmes. Les modèles d'IA générative sont entraînés sur des millions d'œuvres d'art créées par des artistes humains, souvent sans leur consentement ou compensation. En utilisant ces outils, tu participes indirectement à cette appropriation problématique.

Au lieu de refuser cette pratique par principe éthique, beaucoup cèdent à la curiosité ou à l'effet de mode, normalisant ainsi cette forme d'exploitation artistique.

Dans l'histoire de l'art, les grandes innovations sont souvent venues d'artistes qui ont osé rompre avec les conventions de leur époque. Or, l'IA fonctionne précisément en assimilant et en reproduisant ces conventions. Elle excelle rarement dans la véritable rupture esthétique.

Imagine un monde où la majorité des artistes utiliseraient les mêmes outils d'intelligence artificielle pour créer. Nous risquerions de voir émerger un paysage artistique de plus en plus homogène, où la singularité et l'originalité deviendraient des denrées rares.

À l'ère du dessin numérique assisté par IA, la véritable distinction ne viendra pas de la qualité technique (que l'IA peut reproduire), mais de la vision personnelle et de l'originalité conceptuelle (que l'IA ne peut pas encore véritablement générer).

Le processus créatif authentique face à l'intelligence artificielle en art digital

Le processus créatif authentique en dessin numérique va bien au-delà de l'obtention d'un résultat visuel séduisant. C'est un voyage complexe qui engage l'artiste tout entier et qui façonne son développement.

Quand tu crées sans IA générative, tu vis une expérience multidimensionnelle :

  • Tu traverses des moments de doute et de questionnement
  • Tu prends des décisions artistiques conscientes à chaque étape
  • Tu explores des chemins inattendus qui émergent pendant la création
  • Tu établis une connexion intime avec ton œuvre
  • Tu apprends de tes erreurs et de tes succès

L'intelligence artificielle court-circuite cette richesse expérientielle. En obtenant un résultat instantané, tu te prives de tous ces moments formateurs qui constituent l'essence même de la pratique artistique.

Pense à la différence entre suivre un chemin déjà tracé et explorer une forêt inconnue. La première option est plus rapide et confortable, mais c'est la seconde qui offre des découvertes uniques et transformatrices.

Dans le domaine de l'art digital, les détours, les difficultés et même les échecs ne sont pas des obstacles à éviter, mais des composantes essentielles de ton évolution artistique. En déléguant entièrement la création à l'IA, tu te prives de ces précieuses expériences qui forment non seulement ton style, mais aussi ta sensibilité et ta vision du monde.

L'IA et le faux sentiment d'accomplissement dans le dessin numérique

L'IA générative crée un curieux paradoxe psychologique : elle procure un sentiment d'accomplissement immédiat, mais ce sentiment est souvent superficiel et éphémère. Nous touchons ici à l'une des illusions les plus subtiles de l'utilisation de l'intelligence artificielle dans l'art digital.

Quand tu génères une image impressionnante avec l'IA, tu ressens une satisfaction immédiate. Pourtant, cette satisfaction diffère fondamentalement de celle que procure la création authentique :

  • Elle ne s'accompagne pas de la fierté d'avoir surmonté des obstacles techniques
  • Elle ne reflète pas un véritable développement de tes compétences
  • Elle s'estompe rapidement, car elle n'est pas ancrée dans un effort personnel significatif
  • Elle peut créer une dissonance cognitive entre le résultat obtenu et tes capacités réelles

C'est comme la différence entre gravir une montagne et regarder une photo panoramique prise au sommet. L'image finale peut sembler identique, mais l'expérience et la satisfaction personnelle sont incomparables.

Plus troublant encore, ce faux sentiment d'accomplissement peut créer une forme d'imposture artistique. Tu présentes comme tienne une création qui, fondamentalement, résulte davantage des capacités de l'IA que de tes propres compétences en dessin numérique.

La vraie satisfaction artistique naît de la progression, de la maîtrise grandissante et de l'expression authentique. Ce sont précisément ces aspects que l'utilisation exclusive d'outils d'intelligence artificielle tend à éclipser.

L'IA ne collabore pas quand elle remplace : pour une éthique de la création

On entend souvent que "l'IA doit être un outil, pas un substitut". C'est joliment formulé, mais la réalité est bien plus rugueuse. Car l'outil, aujourd'hui, remplace. Il efface. Il avale la création humaine pour recracher des images sans auteur, sans intention, sans histoire. Et ce qu'on appelle trop vite "progrès" masque souvent un véritable saccage artistique.

Le pillage organisé du visuel

Les IA génératives d’images se nourrissent d’œuvres humaines. Pas de banques libres de droits, pas de créations offertes à la science. Non. Elles s’entraînent sur des travaux volés, aspirés, stockés sans autorisation. Des heures, des années de travail, de recherche, d’identité visuelle, d’exploration sensible… dérobées au clic, digérées par des machines, puis recyclées sans reconnaissance.

Ce qu’on appelle “données d’entraînement” est souvent du pillage. Ce n’est pas un mal collatéral. C’est le cœur du modèle.

La coquille vide du prompt

"Ce n’est pas parce qu’on génère qu’on crée." L’illusion de la maîtrise est forte : on entre trois lignes, on obtient une image. Mais ce qui manque, c’est l’œil, la main, le geste, la vision. Une image peut être belle techniquement et être vide de toute substance. La composition, la couleur, la lumière, l’intention… ne sortent pas d’une formule magique. Elles viennent d’un parcours.

Quand l’IA remplace l’apprentissage, elle coupe l’artiste de son propre chemin. Elle court-circuite la progression.

L’IA ne réinvente rien, elle recycle

L’un des paradoxes les plus forts de cette révolution, c’est que l’IA ne peut survivre sans nous. Elle n’invente pas. Elle compresse, mélange, croise, recompose. Si demain les artistes cessent de créer, l’IA tournera en rond. Ceux qui l’encensent en croyant assister à la fin de l’art ne comprennent pas que l’outil qu’ils admirent est né de ce qu’ils ignorent.

Remplacer ou collaborer ?

L’IA utilisée pour générer des images visuelles ne collabore pas, elle remplace. Elle nie l’existence des artistes qu’elle exploite. Elle devient un outil d’effacement plus qu’un outil de soutien. On ne parle plus d’assistance, mais de substitution.

Ce n’est plus un outil au service des artistes. C’est un moyen de produire sans eux. Une imitation qui prend leur place sans en avoir ni la profondeur ni la légitimité.

Ce n’est pas juste une question d’outil. C’est une question de place, d’éthique, de reconnaissance. Aujourd’hui, l’IA est un problème quand elle repose sur le vol, sur l'invisibilité des artistes, sur une logique de remplacement. La vraie création ne peut se passer de l’humain. Et si l’IA veut vraiment être un allié, alors elle devra apprendre à respecter ce qu’elle exploite : notre vision, notre histoire, notre regard.

Le vol artistique en action : des cas réels d'appropriation par l'IA

Derrière les débats théoriques sur l'IA générative se cachent des histoires bien réelles d'artistes dont le travail a été utilisé sans consentement pour entraîner ces technologies. Ces exemples illustrent concrètement l'ampleur du problème et ses conséquences sur les créateurs.

Greg Rutkowski, peintre fantastique reconnu, a vu son nom devenir l'un des prompts les plus utilisés dans Midjourney et Stable diffusion. Son style distinctif, fruit de nombreuses années de développement artistique, est désormais massivement copié par des IA. Ironie cruelle : les recherches Google de son nom affichent aujourd'hui davantage d'images générées par IA que ses véritables œuvres, diluant son identité artistique dans un océan de copies.

Greg Rutkowski
Crédit image : Greg Rutkowski (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Karla Ortiz, illustratrice renommée travaillant pour Marvel et d'autres grands studios, a découvert avec stupeur ses illustrations dans les jeux de données d'entraînement utilisés sans sa permission. Elle est devenue l'une des voix les plus actives dans la lutte juridique contre cette appropriation artistique.

Karla Ortiz
Crédit image: Karla Ortiz (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Le cas de Simon Stålenhag est particulièrement révélateur. Créateur d'un univers de science-fiction rétro-futuriste très distinctif (adapté en série "Tales from the loop"), son esthétique unique, développée sur des années de travail est désormais reproductible instantanément via quelques prompts bien choisis.

Stålenhag
Crédit image: Simon Stalenhag (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Kelly McKernan, artiste indépendante, a franchi le pas juridique en intentant un procès contre Stability AI et d'autres entreprises après avoir découvert ses œuvres dans le jeu de données Laion utilisé pour entraîner Stable diffusion. Son combat illustre la difficulté des artistes individuels face à ces géants technologiques.

Kelly McKernan
Crédit image : Kelly MacKernan (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Plus troublant encore, le cas de Hollie Mengert, illustratrice pour Disney, dont le style a été spécifiquement ciblé et cloné dans un modèle d'IA "spécialisé dans le style Hollie Mengert". Ce n'est plus de l'inspiration ou de l'influence : c'est une reproduction délibérée et systématique de son travail, sans compensation ni reconnaissance.

Hollie Mengert
Crédit image : Hollie Mengert (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Même après leur disparition, les artistes ne sont pas épargnés. Kim Jung Gi, célèbre artiste coréen connu pour ses dessins complexes réalisés sans esquisse préalable, a vu ses œuvres utilisées pour créer un modèle d'IA peu après son décès, provoquant l'indignation de sa succession et de ses fans qui y ont vu une profanation de son héritage artistique.

Kim Jung Gi
Crédit image : Kim Jung Gi (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Lisa Aisato, illustratrice norvégienne, a quant à elle découvert que son style distinctif était facilement reproductible via des prompts spécifiques dans des générateurs d'images par IA, balayant en quelques secondes des années de développement stylistique.

Crédit image : Lisa Aisato (respecte l'oeuvre de l'artiste)

Ces exemples ne sont que la partie visible de l'iceberg. Pour chaque artiste célèbre qui s'exprime sur ce sujet, des milliers d'autres, moins connus ou disposant de moins de ressources pour se défendre, subissent silencieusement cette appropriation. Ces histoires révèlent la réalité brutale derrière l'apparente magie de l'IA générative : une technologie qui s'est construite sur l'exploitation systématique et non consentie du travail créatif humain.

Le problème dépasse largement la simple inspiration : il s'agit d'un système industriel qui extrait la valeur du travail artistique sans compensation, transformant des années de développement créatif en simples données d'entraînement, puis en outils qui menacent directement la subsistance même des créateurs originaux.

L'impact économique dévastateur de l'IA sur la carrière des artistes

Au-delà des questions éthiques et créatives, l'essor de l'IA générative dans l'art digital a des conséquences économiques concrètes et préoccupantes pour les artistes professionnels. Ces technologies ne se contentent pas de copier des styles : elles menacent directement les moyens de subsistance de toute une communauté créative.

La dévaluation massive du travail artistique
Les générateurs d'images par IA ont créé une inflation artificielle de "l'offre visuelle", entraînant une dévaluation sans précédent du travail artistique professionnel. Des illustrations qui nécessitaient auparavant des dizaines d'heures de travail et se négociaient à plusieurs centaines d'euros peuvent désormais être simulées en quelques secondes, pour quelques centimes.

Cette dévaluation se manifeste concrètement dans plusieurs secteurs :

- Illustration éditoriale : De nombreuses publications à petit budget remplacent déjà leurs illustrateurs par des images générées par IA, à une fraction du coût

- Concept art : Les phases préliminaires de conception visuelle dans le jeu vidéo et le cinéma, traditionnellement confiées à des artistes spécialisés, sont de plus en plus automatisées

- Art de couverture : Des éditeurs et auteurs auto-publiés utilisent massivement l'IA pour créer des couvertures de livres, au détriment des illustrateurs professionnels

- Commandes personnalisées : Le marché des portraits et illustrations sur commande subit une concurrence déloyale des images générées instantanément

L’IA générative : une menace pour les jeunes illustrateurs ?

L’émergence des intelligences artificielles génératives, telles que Midjourney ou DALL·E, bouleverse profondément le paysage des métiers créatifs. Si ces outils offrent des possibilités inédites, ils suscitent également de vives inquiétudes, notamment chez les illustrateurs en début de carrière.

Un marché d’entrée en péril
Traditionnellement, les jeunes illustrateurs construisaient leur carrière en acceptant des commandes modestes, leur permettant de développer leur style et de se constituer une clientèle. Aujourd’hui, ce “marché d’entrée” s’effondre face à la concurrence des images générées par IA, privant toute une génération d’artistes des opportunités nécessaires pour bâtir leur avenir professionnel.

Une pression tarifaire accrue
La pression à la baisse sur les prix est palpable dans toute l’industrie. Selon l’Observatoire ADAGP-SGDL 2024, 16 % des artistes-auteurs interrogés constatent déjà un effet négatif des IA génératives sur leur activité et leurs revenus. Des clients, souvent mal informés sur la différence entre une image IA et une création authentique, utilisent désormais les tarifs dérisoires de l’automatisation comme référence dans leurs négociations.

« J’ai reçu récemment un message d’un client régulier me demandant pourquoi il devrait continuer à payer mes illustrations 500€ quand il peut obtenir quelque chose de similaire pour 5€ avec Midjourney », témoigne Marie L., illustratrice freelance depuis 12 ans.

Cette concurrence déloyale menace directement la viabilité économique des artistes indépendants, d’autant que les IA génératives recyclent des milliards d’œuvres protégées sans compensation, comme le dénonce l’ADAGP.

Des chiffres alarmants
- 78 % des illustrateurs perçoivent l’IA comme une menace directe pour leur activité professionnelle, selon l’Observatoire ADAGP-SGDL 2024.
- 65 % des artistes-auteurs sont opposés à l’exploitation de leurs œuvres par les logiciels d’IA, même contre rémunération.
- Une étude conjointe de Harvard et de l’Imperial College révèle une baisse de 17 % des offres junior en graphisme entre 2021 et 2023.
- McKinsey estime que 30 à 50 % des tâches graphiques basiques pourraient être automatisées d’ici 2025.

Vers une reconnaissance de la création humaine
Face à ces défis, les artistes-auteurs s’expriment majoritairement en faveur d’un label permettant de distinguer les œuvres de création humaine de celles produites par des IA. Cette initiative viserait à préserver l’intégrité artistique et à valoriser le travail des créateurs.

Sources :
- Observatoire ADAGP-SGDL 2024 : Impact des IA génératives sur les artistes-auteurs (lien)
- McKinsey 2023 : The economic potential of generative AI (lien)
- Tom’s guide : Midjourney - prix, inscription, astuces (lien)

Le double vol : utilisation sans consentement puis concurrence déloyale

La situation est d'autant plus révoltante que les artistes font face à un double préjudice économique :

1. Leurs œuvres sont d'abord utilisées sans compensation pour entraîner les IA
2. Ces mêmes IA leur font ensuite une concurrence directe sur leur propre marché

C'est comme si un artisan voyait ses créations copiées par une usine, qui utiliserait ensuite ces copies pour produire en masse des imitations à bas prix de son travail. À la différence près que dans le cas de l'IA générative, cette appropriation se fait de manière invisible et à une échelle industrielle.

Des secteurs entiers en transformation forcée

Certains domaines artistiques sont particulièrement vulnérables à cette disruption économique :

- Character design : La création de personnages standardisés pour des productions commerciales est déjà largement automatisable

Crédit image : Hicham Habchi (exemple character design)

- Illustrations stock : Le marché des images génériques est en chute libre face à la génération illimitée d'images par IA, comme cet exemple ci-dessous

Image générée par l'IA décor intérieur
Image générée par l'IA - décor intérieur

- Matte painting : La création d'arrière-plans et de décors, surtout dans les productions à budget limité, est de plus en plus déléguée à l'IA

Oeuvre de Pablo Olivera
Crédit image : Pablo Olivera (exemple du matte painting)

De nombreux studios de taille moyenne ont déjà réduit leurs équipes artistiques, utilisant l'IA générative pour les tâches "de base" et ne conservant qu'un nombre limité d'artistes seniors pour la direction artistique et les finitions.

Des compétences dévaluées sur le marché

Les artistes rapportent également une dévaluation de leurs compétences techniques sur le marché du travail. Des savoir-faire qui nécessitaient des années de formation et de pratique, comme la maîtrise de la perspective, de l'anatomie ou du rendu des matériaux, sont perçus comme moins précieux à l'ère de l'IA générative.

Cette tendance se reflète déjà dans les offres d'emploi du secteur créatif, où l'on observe un glissement des exigences : moins d'accent sur les compétences artistiques fondamentales et davantage sur la capacité à diriger efficacement des outils d'IA.

Les problèmes juridiques et éthiques liés à l'IA générative en art

L'utilisation de l'IA générative dans le domaine de l'art digital soulève de graves questions juridiques et éthiques qu'on ne peut ignorer. Au cœur de ces préoccupations se trouve la protection des droits des artistes dont les œuvres ont été utilisées sans consentement pour entraîner ces algorithmes.

En France, le code de la propriété intellectuelle est clair à ce sujet.

L'article L.111-1 stipule :

"L'auteur d'une œuvre de l'esprit jouit sur cette œuvre, du seul fait de sa création, d'un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d'ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d'ordre patrimonial [...]" (lien)

L'IA générative soulève plusieurs problèmes au regard de ce cadre légal :

  • Les œuvres utilisées pour l'entraînement ont rarement fait l'objet d'autorisations explicites
  • La question de la paternité des œuvres générées reste juridiquement floue
  • Les droits moraux des artistes (notamment le droit au respect de l'intégrité de l'œuvre) sont potentiellement bafoués
  • La juste rémunération des créateurs originaux n'est pas assurée

Beaucoup d'utilisateurs de ces technologies n'ont pas conscience du danger qu'elles représentent pour l'écosystème artistique. Par simple curiosité ou désir de suivre une tendance, ils participent et cautionnent indirectement ce vol massif d'images, au lieu de refuser cette pratique par principe éthique.

L'article L.122-4 du même code précise :

"Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l'adaptation ou la transformation, l'arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque." (lien)

La question se pose donc : les images utilisées pour entraîner ces IA n'ont-elles pas été reproduites sans le consentement de l'auteur ?

Et les créations générées ne sont-elles pas des reproductions partielles ou des adaptations d'œuvres préexistantes ?

En tant qu'artiste conscient des enjeux, je t'encourage à réfléchir à ces questions avant d'utiliser ces outils et à faire preuve de solidarité envers la communauté des créateurs.

réglementation des images IA génératives en France et en Europe

1. Règlement européen sur l’intelligence artificielle (AI Act)

  • Le règlement européen AI Act, publié récemment, encadre les systèmes d’IA selon une classification par niveaux de risque, incluant les IA génératives qui produisent des images, sons, vidéos ou textes synthétiques.
  • Ce règlement impose une obligation de transparence, notamment un étiquetage obligatoire des contenus générés par IA pour informer les utilisateurs que le contenu est artificiel.
  • Les fournisseurs de systèmes d’IA doivent s’assurer que les images générées soient marquées de façon lisible par machine et détectable comme artificielles.
  • Cette loi vise à lutter contre la désinformation, les deepfakes, et à garantir la fiabilité des contenus numériques.
  • Elle entrera en vigueur progressivement, avec des exigences spécifiques pour les systèmes d’IA à risque limité comme les générateurs d’images (ex : Midjourney, DALL·E, Firefly...).

2. Proposition de loi française sur l’identification des contenus IA sur les réseaux sociaux

  • Une proposition de loi déposée en décembre 2024 vise à imposer aux utilisateurs des réseaux sociaux l’obligation de signaler explicitement les images générées ou modifiées par IA.
  • Cette loi complète la loi du 9 juin 2023 qui impose déjà aux influenceurs de mentionner « images virtuelles » pour les images modifiées par IA.
  • Elle prévoit également des sanctions (amendes) en cas de non-respect de cette obligation.
  • Les plateformes en ligne devront mettre en place des moyens techniques pour détecter et vérifier l’étiquetage des contenus IA.
  • Cette proposition s’inscrit dans une volonté plus large de transparence et de lutte contre les deepfakes et la désinformation.

3. Droit d’auteur et propriété intellectuelle

  • En France et dans l’Union Européenne, le droit d’auteur traditionnel s’applique uniquement aux œuvres avec une intervention humaine.
  • Les images générées de façon totalement autonome par une IA ne peuvent pas être protégées par le droit d’auteur.
  • Aux États-unis, le bureau du copyright a indiqué en 2023 que les œuvres générées uniquement par IA ne peuvent pas bénéficier de droits d’auteur, sauf si une contribution humaine substantielle est apportée.
  • Les entreprises peuvent utiliser les images générées par IA, mais doivent vérifier les conditions d’utilisation des générateurs d’images et assumer la responsabilité de la diffusion, notamment en respectant les droits des tiers (propriété intellectuelle, droit à l’image).

4. Sites utiles pour approfondir

  • Ekino : article détaillé sur les droits d’auteur, utilisation et réglementation internationale des images générées par IA (lien).
  • Imatag : explications sur la loi européenne AI act et l’obligation d’étiquetage des contenus générés par IA (lien).
  • Village Justice : texte sur la proposition de loi française pour distinguer les contenus IA sur les réseaux sociaux (lien).
  • CNIL : questions-réponses sur le règlement européen AI act et ses implications (lien).

En tout cas, la législation sur les images générées par IA est en pleine évolution, avec un cadre européen qui impose transparence et étiquetage, et une législation française qui tend à renforcer ces obligations, notamment sur les réseaux sociaux. Le droit d’auteur ne protège pas encore les créations entièrement générées par IA, mais l’utilisateur humain qui commande ou modifie l’image peut en être responsable.

Pour une utilisation conforme, il faut donc :

  • Vérifier les conditions d’utilisation des outils d’IA.
  • Respecter les droits d’auteur et droits à l’image.
  • Appliquer les obligations de transparence et d’étiquetage prévues par la loi européenne et française.

Comment avoir une approche éthique de la créativité à l'ère de l'IA ?

À l'ère de l'IA générative, comment peut-on encore développer une pratique authentique du dessin numérique ?

Cette question devient cruciale pour les artistes débutants et intermédiaires qui naviguent dans un paysage technologique en rapide évolution.

Voici quelques principes fondamentaux pour un apprentissage artistique solide :

  • Commence par maîtriser les fondamentaux sans assistance automatisée
  • Fixe-toi des périodes d'entraînement régulières où tu t'interdis l'usage de l'IA
  • Rejoins mon Discord d'artistes qui valorise le développement des compétences artistiques (lien)
  • Explore le réseau social Cara qui interdit l'IA et est exclusivement dédié aux artistes (mon line Cara)
  • Analyse les œuvres que tu admires pour comprendre leur construction, pas seulement leur apparence
  • Accepte que le développement artistique authentique prend du temps et comporte des phases de plateau

Pour réussir dans le dessin sans utiliser l'IA, voici des conseils concrets :

  • Pratique quotidiennement, même si ce n'est que 15-30 minutes par jour
  • Commence par des exercices fondamentaux (croquis rapides, études de formes basiques)
  • Progresse graduellement vers des sujets plus complexes
  • Accepte les erreurs comme partie intégrante du processus d'apprentissage
  • Rejoins des défis comme Inktober ou les challenges de 30 jours
  • Trouve un mentor ou partage ton travail pour obtenir des retours constructifs
  • Célèbre tes progrès, même les plus modestes

Il est particulièrement important de cultiver ta sensibilité artistique personnelle :

  • Développe un journal visuel où tu collectes tes influences et inspirations
  • Pratique régulièrement le dessin d'observation pour affiner ton regard
  • Expérimente avec différentes techniques et médiums, y compris non-numériques
  • Cherche à exprimer tes émotions et perspectives uniques à travers ton art digital

Pour t'inspirer et trouver des références, il existe de nombreuses alternatives éthiques à l'IA :

  • Explore Pinterest en utilisant des mots-clés précis
  • Observe le monde qui t'entoure avec un regard curieux
  • Explore divers médias: livres d'art, mangas, comics, films, séries, animes
  • Visite des expositions, des musées, des galeries (physiques ou virtuelles)
  • Lorsque tu partages le travail d'un artiste, mentionne toujours l'auteur/l'autrice par respect
  • Engage-toi dans des communautés créatives qui valorisent l'art authentique

Ne te laisse pas influencer par les discours simplistes sur les réseaux sociaux qui glorifient l'IA sans considération pour les préoccupations légitimes des artistes, souvent fatigués de voir leur travail exploité sans consentement.

Le défi, à l'ère de l'intelligence artificielle, n'est pas seulement d'apprendre à utiliser ces nouveaux outils, mais de cultiver délibérément ce qui reste spécifiquement humain dans notre expression artistique.

Mon témoiugnage : Ma claque face à l’IA générative

J’ai mis les pieds dans le monde de l’IA générative : Midjourney, Adobe Firefly, Leonardo et toute la bande. Au début, je dois l’avouer, c’est bluffant. Tu balances trois mots et bim ! Une image qui sort comme par magie. C’est fun… pendant 5 minutes.

Mais très vite, y’a un truc qui m’a mis mal à l’aise. Ce côté instantané, sans effort, sans sueur, sans galère. Juste un prompt balancé et l’image arrive. C’est beau ? Peut-être. C’est satisfaisant ? Pas vraiment. On saute direct la case apprentissage, les erreurs, les nuits blanches à raturer, le plaisir de s’améliorer. Et ça, franchement, c’est flippant. On perd ce qui rend la création vivante : le bordel, les doutes, les petites victoires.

Et puis faut qu’on parle d’un truc : les prompts. Tu tapes, tu ajustes, tu retapes… encore et encore. C’est l’équivalent numérique de parler à quelqu’un qui comprend rien du premier coup. Et quand enfin t’as une image, elle est pixelisée, bancale, bourrée d’erreurs. Trois doigts et demi, un œil qui flotte dans le vide, des fringues en fusion… l’horreur. Et on est censés applaudir ça ?

Ce qui me scotche, c’est de voir des gens encenser ce truc sans même se poser une seule question. Comment on peut être ok avec le fait que ces IA ont été entraînées sur des millions d’œuvres volées à des artistes, souvent sans leur accord ? On parle de tafs faits avec passion, de nuits sans sommeil, d’années d’apprentissage… tout ça transformé en données à bouffer par une machine. Et en bonus, on nous demande de dire merci ? Sérieusement ?

Le plus dur, c’est pas l’IA elle-même. C’est d’essayer de faire comprendre ça autour de moi. Quand je dis “hé, tu pourrais bosser avec un vrai illustrateur”, on me regarde comme si j’avais demandé de peindre la Joconde à la main, les yeux bandés. “C’est trop cher”, “j’ai pas le temps”, “l’IA c’est plus simple”. Ouais, ok. Mais à ce rythme, on va tuer le métier avant même d’avoir pu le défendre.

J’dis pas qu’il faut jeter l’IA à la poubelle (même si, des fois, j’en rêve un peu). Je dis juste : et si elle était construite autrement ? Une IA éthique, qui respecte les créateurs, qui bosse avec nous au lieu de nous pomper jusqu’à l’os. Ce serait pas mal, non ?

Parce qu’au final, le vrai danger, c’est pas les images moches à six doigts. C’est l’idée qu’on pourrait se passer de nous, les humains. Qu’on pourrait tout remplacer par une machine. Mais l’art, c’est pas juste un joli rendu. C’est une erreur bien placée, un trait qui tremble, une émotion qu’on n’arrive même pas à expliquer. C’est du vécu, du vrai, du fragile.

Alors ouais, j’ai peur. Peur qu’un jour, l’IA devienne cette grosse machine bien huilée qui nous pique notre âme créative pendant qu’on scroll sans réfléchir. Mais tant qu’on est là pour gueuler un bon coup, pour questionner, pour créer avec le cœur et pas juste avec des algos, y’a encore un espoir.

Faut pas qu’on lâche. Faut qu’on rappelle à tout le monde que l’imperfection humaine, c’est ça qui rend l’art irremplaçable.

Conclusion

L’IA générative n’est pas une simple technologie neutre. Elle s’inscrit dans un système qui repose trop souvent sur le pillage, l’effacement et le remplacement. Ce n’est pas un progrès quand il se construit sur l’injustice. Ce n’est pas une avancée quand il détruit ce qu’il prétend célébrer.

On ne parle pas ici de fantasme technophobe, mais de faits : des millions d’œuvres aspirées sans autorisation, des artistes rendus invisibles, une machine qui ne crée pas mais qui recompose, à partir d’une matière volée.

L’enjeu n’est pas d’apprendre à cohabiter avec une IA inspirante”. L’enjeu est de refuser qu’elle devienne la norme, le raccourci, le substitut. Ce n’est pas à l’artiste de s’adapter à l’outil. C’est à l’outil de respecter l’artiste.

Créer, ce n’est pas simplement produire. C’est ressentir, chercher, douter, recommencer. C’est une démarche humaine, imparfaite, mais profondément incarnée. Tant que l’IA sera utilisée pour copier sans consentement, pour produire sans regard, pour remplacer sans reconnaissance, elle restera un problème.

Ce n’est pas la créativité humaine qu’il faut moderniser. C’est le respect qu’on lui doit qu’il faut restaurer.

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